À l'affiche

Théâtre/Public n°235. Traduire

carte blanche à la Maison Antoine-Vitez

Le dossier de ce numéro de Théâtre/Public est consacré à la traduction théâtrale. Il donne la parole aux traductrices et aux traducteurs, aux autrices et aux auteurs traduits et à celles et ceux qui les mettent en scène.
Grâce à la Maison Antoine-Vitez, l'occasion est offerte de s'immerger dans les pratiques contemporaines de la traduction pour réfléchir à ce qu'elles ont de singulier : on pourra en appréhender les enjeux, mais aussi la diversité, selon les aires géographiques, les esthétiques et les personnalités.


"Marcella de Ulloa ou la Dernière Toile de Vélasquez" d'Howard Barker

Disponible aux Éditions Théâtrales

Traduit de l'anglais par Pascale Drouet.
Marcella de Ulloa plonge au cœur des Ménines, de Vélasquez, l’un des plus grands chefs-d’œuvre de l’histoire de la peinture. Barker s’intéresse à la scène cachée que le peintre espagnol est en train d’exécuter. Marcella est une fascinante érudite de 70 ans que tous admirent et recherchent, sauf Vélasquez. Quand ce dernier est contraint par le roi de la peindre nue, il se découvre un tel attrait pour ce corps que révéler son œuvre pourrait bouleverser l’esthétique et le cours du monde.


"Une famille heureuse" de Javier Hernando Herráez

Disponible aux éditions Les Solitaires Intempestifs

Traduit de l'espagnol par Victoria Mariani.
Une famille heureuse est une œuvre poétique qui parle de son temps sans pour autant en exhiber les problèmes frontalement.
Une cave comme une caverne de Platon où la nature et la société des hommes y sont reproduites et déformées grâce à la parole des personnages qui constituent cette famille, et plus particulièrement celle du fils, un narrateur ou une didascalie personnifiée, jamais nommé.


"Ridicules ténèbres" de Wolfram Lotz

du 10 mars au 4 avril, Théâtre de Poche, Bruxelles

Traduit de l'allemand par Pascal Paul-Harang.
Mis en scène par Olivier Boudon.

Cette « pièce de guerre » s'inspire du roman de Joseph Conrad Au cœur des ténèbres et de son avatar cinématographique, Apocalypse now de Francis Ford Coppola. À l'instar de Shakespeare qui localisait la Bohème au bord de la mer, Lotz soumet la géographie aux puissances de la poésie : l'Afghanistan, l'Afrique et l'ex-Yougoslavie ne forment plus qu'une même et unique zone de crise. Ou plutôt une même zone fantasmatique. Et c'est dans cette insondable jungle que vont se rendre ridicules ceux-là mêmes qui croient ou prétendent se rendre utiles à l'humanité : les Européens.


"Massacre" de Lluïsa Cunillé

du 23 janvier au 8 mars, Studio-Théâtre de la Comédie-Française, Paris

Traduit du catalan par Laurent Gallardo.
Mis en scène par Tommy Milliot.
Massacre est un huis clos qui se déroule dans un hôtel isolé. S'y rencontrent deux femmes à un moment charnière de leur vie. Tel un rituel, dans une atmosphère d'inquiétante étrangeté, elles se retrouvent chaque soir dans le salon. Les mots apparemment ordinaires laissent progressivement entrevoir le trouble qui les habite, jusqu'à l'arrivée impromptue d'un homme qui fait voler en éclats leur équilibre précaire.
La trajectoire de Lluïsa Cunillé, loin des modes et des impératifs commerciaux lui a valu une réputation d'autrice culte de la scène théâtrale catalane. Elle nous entraîne ici dans une temporalité trouble où les époques semblent se chevaucher et où l'avenir a peut-être déjà eu lieu.
Disponible aux éditions Les Solitaires Intempestifs.


"Chiot de garde" de Peer Wittenbols

du 23 au 26 janvier, Espace Culture Picasso, Longueau

Traduit du néerlandais par Gerco de VroegLaurent Muhleisen et Esther Gouarné.
Mis en scène par Julien Graux.

Pour son exposé sur la mort, Wolf, le garçon d'en face, vient poser sept questions à Mara et Evi. Mais les filles n'ont pas envie de voir le fragile équilibre de la maison perturbé par cet intrus trop curieux. Elles ont bien assez à faire avec leur mère, couchée depuis onze mois, depuis le jour où leur père est mort brutalement dans un accident de voiture. Pourtant, petit à petit, grâce à sa sincérité et à sa prévenance, Wolf réussira à se rapprocher des deux sœurs, et même de la mère, accélérant ainsi le processus de deuil.


"Retours" de Fredrik Brattberg

du 7 au 18 janvier, Théâtre de la Reine Blanche, Paris

Traduit du norvégien par Terje Sinding.
Mis en scène par Arlette Desmots.
Fredrik Brattberg s'immisce au cœur du noyau familial pour lui faire rendre gorge.
Gustav a disparu. Tout porte à croire qu'il est mort, et ses parents effondrés organisent un enterrement symbolique... mais Gustav ressurgit miraculeusement. Au bout de quelque temps, Gustav disparaît de nouveau. Ses parents organisent un nouvel enterrement symbolique, mais moins fastueux que le premier. Encore une fois Gustav réapparaît...


"Fruits du néant" de Ferdinand Bruckner

du 8 au 13 janvier, Théâtre des Clochards Célestes, Lyon

Traduit de l'allemand (Autriche) par Ruth Orthmann et Alexandre Plank.
Mis en scène par Hugo Roux.
La jeunesse perdue qui hante Fruits du néant pense au futur avant de jouer à la roulette russe. Comment, en effet, se construire un avenir lorsque nos aînés ne nous ont laissé en héritage que le vide ? Drogue, haine, meurtre, tous les moyens sont bons pour exorciser les démons du passé nazi de leurs parents. C'est à ce prix que ces jeunes pourront accéder à la rédemption et prendre en main leur avenir. La critique sociale acerbe qui sous-tend ce récit d'un road-trip nihiliste résonne depuis l'Allemagne post-Reich jusqu'aux oreilles de la jeunesse d'aujourd'hui avec autant de vérité.
Disponible aux éditions Théâtrales.


"Amsterdam" de Maya Arad Yasur

disponible aux éditions Théâtrales

Traduit de l'hébreu par Laurence Sendrowicz.
Une jeune violoniste, israélienne, enceinte, résidant à Amsterdam, reçoit un beau matin une facture de gaz d’un montant de 1 700 euros, impayée depuis… 1944. Cette situation de départ en apparence anodine l’entraînera sur la piste de l’histoire de son appartement et plus largement de la capitale néerlandaise sous occupation nazie, entre résistance et félonie.
Dans Amsterdam, Maya Arad Yasur déploie une narration théâtrale inventive : les protagonistes construisent la fable au fur et à mesure qu’ils la jouent, s’autorisant des écarts et des embardées dans les lieux, les époques, les personnages même. Acteurs et actrices, au nombre illimité, sont libres au sein de ce canevas puissant qui appelle le jeu et les tentatives.
Multiprimée, sélectionnée par de nombreux comités de lecture, cette pièce à l’ironie mordante est à découvrir d’urgence.


"Le Repli du paysage" de Magdalena Schrefel

disponibles aux éditions Espaces 34

Traduit de l'allemand (Autriche) par Katharina Stalder.
Dans un présent intemporel, au fin fond d’une campagne à la fois mythifiée et concrète, un homme néglige les travaux de la ferme depuis la mort de sa femme et se retire dans son monde. Il commence alors son « travail » : la construction d’une Machine qui saurait tout faire, comme une utopie transhumaniste, une sorte d’installation-monde métaphorique qui aspire la vie.
Son fils, jeune garçon au début de la pièce puis jeune homme, ne parvient pas à faire entendre raison au père, pas plus que le bourgmestre – voix de la raison et du compromis. Mais les eaux montent et le danger d’engloutissement se fait de plus en plus précis. La Machine elle-même se met à bruire, à parler ?
Construite sur plusieurs temporalités, la pièce est ponctuée par le duo de deux jeunes filles d’aujourd’hui, sorte de clowns shakespeariens, qui décident de partir à l’aventure, au-delà de la zone interdite autour de la machine.
La langue, en monologues bouillonnants ou dialogues vifs, très construite, ciselée, dérapant, contribue à l’impression d’inéluctabilité de la catastrophe.
Une interrogation sur la place de la spiritualité des vivants – quelle qu’en soit la nature.