Écriture

  • Pays d'origine : Autriche
  • Titre original : Vereinte Nationen
  • Date d'écriture : 2016
  • Date de traduction : 2023

La pièce

  • Genre : comédie grinçante
  • Nombre d'actes et de scènes : La pièce est divisée en deux parties, composées chacune de plusieurs scènes non numérotées.
  • Décors : Différents espaces dans les appartements des parents (cuisine, chambre, salon, salle de bain) et d’Oskar (bureau, jardin, chambre, salon). Dans la deuxième partie, l’appartement des parents est plus luxueux (salon et chambre). La dernière scène se déroule dans la rue. Les lieux n’appelant pas une facture réaliste, ils peuvent être représentés sommairement.
  • Nombre de personnages :
    • 5 au total
    • 2 homme(s)
    • 3 femme(s)
    • dont une fille d’environ 7 ans pour quelques scènes
  • Durée approximative : 100 mn
  • Création :
    • Période : 10 janvier 2017
    • Lieu : Nationaltheater de Mannheim
  • Domaine : protégé, les droits sont aux éditions de L’Arche

Édition

Cette traduction n'est pas éditée mais vous pouvez la commander à la MAV

Résumé

Le sujet est terrifiant : l’exploitation d’une enfant que l’on rend malheureuse pour gagner de l’argent. Et pourtant la pièce est souvent drôle.

À la première scène, Anton réprimande sa fille Martina qui refuse de manger sa purée et sa viande. Lorsqu’elle tente timidement de se justifier, il lui rétorque qu’« elle peut prendre ce ton aux Nations Unies », mais pas avec lui. À la scène suivante, une conversation entre Anton et sa femme Karin révèle que toute cette scène, comme d’autres auparavant, a été filmée à l’insu de Martina par une caméra cachée dans un paquet de cornflakes. Les parents vendent les films grâce à Oscar qui se charge du « marketing » de ce commerce secret. Au début, ils avaient 103 abonnés, mais les chiffrent ont augmenté rapidement, notamment à partir du moment où ils ont accepté (à contre-cœur pour Anton) de répondre aux commandes des souscripteurs – où ces derniers peuvent indiquer la manière dont l’enfant doit être punie. Alors que tous s’efforcent d’obtenir les meilleures ventes, des dissensions se font bientôt sentir : Karin voudrait tourner elle aussi avec Martina, Anton souhaite des scènes aussi naturelles que possible et, pris d’un délire paranoïaque, il se sent observé avec sa fille dans la rue par des individus aux lunettes noires, Oscar donne des conseils qui ne sont pas suivis et Jessica, sa compagne, refuse les tentatives de sécession féministe que lui propose Karin. On ne sait pas comment prendra fin cette histoire, si ce n’est qu’elle tournera certainement mal pour Martina : la petite fille risque fort d’être écrasée comme cette coccinelle incapable de voler qu’Anton, à la dernière, scène, observe attentivement sur le trottoir alors qu’approche une parade militaire.

Regard du traducteur

Clemens Setz fait partie de ces auteurs et autrices d’Autriche qui dérangent parce qu’ils révèlent sur un mode à la fois drôle et violent les mesquineries, les bassesses et les pulsions sordides sous-jacentes dans les rapports sociaux. Setz est aussi un grand inventeur de fables, plus loufoques et plus surprenantes les unes que les autres, bien que situées dans un univers en apparence quotidien. Son écriture est efficace, rythmée, déroulant une dramaturgie complexe où rien n’est laissé au hasard. Les dialogues sont vifs et pleins d’esprit, les personnages, qui semblent empruntés à une galerie de tableaux de la société contemporaine, présentent pourtant des divergences qui les rendent étranges, étonnants et soulèvent à la fois notre répulsion et notre curiosité. S’ils nous intéressent, c’est parce qu’ils nous dérangent profondément. Nations Unies n’est pas une pièce sur la maltraitance infantile, dans le sens où elle chercherait à la dénoncer – le trafic qui s’organise aux dépens de Martina est absolument injustifiable, l’indignation qu’il suscite est univoque. Ce qui rend la pièce grinçante, en revanche, c’est de voir toutes les stratégies qu’inventent les personnages pour s’arranger avec la réalité : Oskar cache son commerce hideux derrière des principes esthétiques bon marché, Karin donne à ses ambitions les apparences de convictions féministes et Anton, pour qui refouler devient de plus en plus difficile, se réfugie dans le discours, parlant pour faire taire sa conscience. L’une de ses digressions nous donne peut-être un indice du projet de cette écriture : que se passerait-il si quelqu’un nous forçait à modifier notre perception de la lune ? Nous y faisait voir une forme obscène, « dégueulasse », dont on ne pourrait ensuite plus se défaire ? Setz semble bien se donner pour tâche de coller un visage étrange, plus repoussant, à une réalité devenue trop familière.