Vent fort

de Jon Fosse

Traduit du norvégien par Marianne Ségol-Samoy

Avec le soutien de la MAV

Écriture

  • Pays d'origine : Norvège
  • Titre original : Sterk Vind
  • Date d'écriture : 2019
  • Date de traduction : 2019

La pièce

  • Genre : théâtre contemporain
  • Décors : unique
  • Nombre de personnages :
    • 3 au total
    • 2 homme(s)
    • 1 femme(s)
  • Durée approximative : 80 mn
  • Domaine : protégé

Édition

  • Edité par : L’Arche éditeur
  • Prix : 13.00 €
  • ISBN : 9782381980676
  • Année de parution : 2024
  • 64 pages

Résumé

Un homme est assis devant une fenêtre. La même fenêtre depuis toujours. Ou peut-être pas. Il a été assis devant d’autres fenêtres puisqu’il a vécu dans différentes villes. Peu importe. C’est pareil et c’est différent. L’homme se trouve dans son appartement avec la femme qu’il aime. Il est revenu chez lui après être parti on ne sait où et pendant un temps indéterminé. Mais l’appartement a changé. Pendant son absence, celle qu’il aime semble avoir déménagé et il est peut-être assis dans un nouvel appartement. Mais pourquoi a-t-elle emménagé ici ? Et où est leur enfant ?

Une femme entre. C’est celle qu’il aime. Elle aussi a changé. Un jeune homme entre. La femme s’approche de lui et l’embrasse. Pourquoi fait-elle ça ? Et pourquoi dit-elle vivre avec le jeune homme ? Impuissant, l’homme devient le témoin de leur amour.

La fenêtre s’ouvre à cause du vent. Le vent forcit. L’homme ne comprend pas pourquoi la femme ne dit rien. N’a-t-elle plus de volonté propre ? Finalement la femme demande à l’homme de partir. Le vent s’est calmé et l’homme voit maintenant de l’autre côté de la rue. Ça grouille de gens. Le vent se remet à souffler. L’homme se tient devant la fenêtre du quatorzième étage. Il se penche. Noir.

Regard du traducteur

Après avoir fait une pause pour se consacrer à l’écriture de sa Septalogie (Septologien I-II), Jon Fosse se remet aujourd’hui à l’écriture dramatique.

Vent fort est la première pièce qu’il écrit depuis quinze ans.

Dans Vent fort on retrouve les thèmes chers à Jon Fosse : l’incommunicabilité, la difficulté d’aimer. L’auteur installe ici un climat d’angoisse et d’étrangeté. La pièce se présente comme un acte, un flux sans rupture fait de retours, de reflets et de répétitions.

Nous sommes en présence de figures et non de personnages. Rien n’est indiqué, tout reste flou à leur sujet. C’est dans la langue que la situation est donnée. La scène est l’espace mental de ces figures. Il y a L’Homme, La Femme et Le Jeune homme. Et ici, comme souvent chez Jon Fosse, ces figurent cherchent à dire quelque chose.

Ces trois figures évoluent dans un appartement qui devient ici le lieu de l’angoisse, le lieu de la projection. C’est un espace dématérialisé et monumentalisé qui donne libre cours à l’imaginaire et qui pousse L’homme, à travers des situations apparemment banales, vers un questionnement sur le monde.

Jon Fosse nous mène par la langue dans un autre rapport à l’être humain, où l’action la plus puissante se fait dans l’immobilité et la contemplation active. La langue de Fosse permet de faire vivre cette pensée qui se construit non seulement pendant qu’elle se dit, mais aussi quand elle n’arrive pas à se dire. C’est dans l’agencement de ces paroles que l’auteur invente ces pensées existentielles. Et les pensées les plus profondes se disent avec un vocabulaire très simple. Alors que la langue tâtonne et cherche son chemin, la pensée surgit.

La figure centrale (L’homme) est bien ancrée dans un présent mais se pose des questions métaphysiques sur son rapport à l’espace-temps et aussi à l’autre. C’est par le regard que tout se passe. L’homme voit. Il découvre les choses dans le regard de sa femme et dans le regard du jeune homme. Mais aussi dans le regard qu’il lance sur le monde à travers la fenêtre.

Jon Fosse nous raconte une rupture amoureuse mais nous sommes aussi en présence d’un être perdu au milieu de lui-même. La pièce aborde les questions métaphysiques de cet homme tourmenté par les incertitudes de sa condition. Il tente de comprendre le monde, de comprendre ce qui lui arrive. Et il tente d’exprimer sa pensée avec les mots dont il dispose. Certaines scènes se révèleront désespérément drôles. Finalement, l'important n'est pas ce qui est dit mais ce qui est tu. Et comme d’habitude, l'écriture de Fosse laissera le spectateur en suspens, dans un univers inquiétant où tout ne sera jamais que suggéré.