Train de nuit pour Bolina

de Nilo Cruz

Traduit de l'anglais par Séverine Magois

Écriture

  • Pays d'origine : U.S.A.
  • Titre original : Night Train to Bolina
  • Date d'écriture : 1993
  • Date de traduction : 2007

La pièce

  • Genre : Théâtre pour adolescents
  • Nombre d'actes et de scènes : 2 actes - 17 scènes
  • Décors : Acte 1 : divers – Acte 2 : un orphelinat
  • Nombre de personnages :
    • 5 au total
    • 2 homme(s)
    • 3 femme(s)
  • Création :
    • Période : 1994
    • Lieu : Magic Theatre, San Francisco
  • Domaine : L'Arche éditeur
  • Lecture publique :
    • Date : oct. 2007
    • Lieu : Lire en Fête à Béziers, dirigée par Dag Jeanneret

Édition

Résumé

Train de nuit pour Bolina est une histoire d’amour. Une histoire d’amour à mort entre deux enfants de dix ans. Dans l’Amérique latine d’aujourd’hui, Mateo et Clara ne supportent plus les mauvais traitements que leur infligent leurs parents ni les conditions de vie difficiles de la ruralité et décident de partir pour Bolina, où ils pensent vivre libres et heureux. Ils finiront dans un orphelinat, séparés puisque soupçonnés d’entretenir des relations intimes. Cette pièce est un conte moderne qui traite avec naïveté et cruauté de sujets rarement abordés dans le théâtre pour enfants : la sexualité et la mort.

Regard du traducteur

Train de nuit pour Bolina – qui s’adresse aux jeunes adolescents plutôt qu'aux très jeunes enfants – est un conte moderne où le réalisme se mêle à l’onirique. Nilo Cruz y raconte une histoire d’amour entre deux enfants, une passion dévorante et tragique rarement abordée avec autant de violence dans ce genre de théâtre. Mateo et Clara ont dix et onze ans. Très vite confrontés au monde des adultes, devant lutter pour vivre, ils ont la maturité des adolescents dont l’enfance a été trop courte – le cerf-volant déchiré de la première scène étant comme un adieu au monde des jeux. Ils forment un couple gémellaire : les séparer c’est les tuer. L’innocence radicale de l’enfant s’oppose à la violence des adultes et d'une Amérique latine déchirée par la guérilla. Dans cette pièce, les enfants parlent beaucoup des adultes, principalement de la famille, mais on ne les voit pas, seule la voix de la mère de Mateo se fait entendre au loin. Dès le début de la pièce, les enfants sont seuls, livrés à eux-mêmes, on les voit au cimetière parmi les tombes, jouant aux morts ou essayant de leur redonner vie. Les parents sont comme les morts du cimetière, impuissants et invisibles. C’est pourtant son père qui a appris à Mateo que les cerfs-volants qui se perdent vont mourir à Bolina, ville inventée par Nilo Cruz. Mateo va donc décider Clara à prendre le train pour Bolina, que les deux enfants identifient à la terre promise. C’est pour eux l’occasion d'échapper aux violences des parents et à la pauvreté qui les entame. Dans la seconde partie de la pièce, on découvre Mateo et Clara sur le perron d’une église, affamés et transis de froid. Mateo est blessé, mordu par un cochon quasi mythologique. Un homme les conduira à l’orphelinat. Mateo et Clara y seront séparés et n’auront de cesse de se retrouver, de se ré-unir. L’orphelinat est l’unique station de leur voyage, c’est aussi le seul endroit où l’on rencontre des adultes – sœur Nora et docteur Martin, les immuables gardiens du temple où les enfants, à l’image de Talita (le troisième personnage-enfant de la pièce), attendent d’être adoptés. L’orphelinat est aussi un endroit du miroir et de la séparation. Les adultes feront tout pour qu’ils ne se rejoignent pas, car ils les soupçonnent d’avoir eu des rapports intimes, ultime recours pour rester soudés dans une société qui ne peut que rompre et détruire. C’est finalement dans la mort que Mateo et Clara se retrouveront, quittant ainsi un monde qui n’est pas conçu pour l’innocence de l’enfant. Nilo Cruz nous présente donc dans cette pièce deux enfants innocents, dans le sens où ils ne sont pas responsables de la violence qui les entoure. Ils subissent cette violence, et l’injustice qui l’accompagne, et n’y répondent que par l’imaginaire, qui les maintient en vie. Les histoires qu'ils s'inventent son leur unique refuge. Ces enfants – joués par de jeunes adultes, selon la volonté de l’auteur, Nilo Cruz n’en fait pas pour autant des petits anges. Ils ont un rapport au corps qui est parfois pervers –comme en témoignent l’obsession de Clara à soigner les plaies de Mateo, quitte à lui faire mal, et le plaisir de Mateo à effrayer Clara avec ses histoires – mais un rapport qui est avant tout dominé, malgré leur jeune âge, par le désir physique de ne faire qu’un avec l’autre.