Cet air infini

de Lluïsa Cunillé

Traduit de l'espagnol par Laurent Gallardo

Avec le soutien de la MAV

Écriture

  • Pays d'origine : Espagne - Catalogne
  • Titre original : Aquel aire infinito
  • Date d'écriture : 2010
  • Date de traduction : 2023

La pièce

  • Genre : drame
  • Nombre d'actes et de scènes : Pas de découpage du texte
  • Décors : deux chaises et une table
  • Nombre de personnages :
    • 2 au total
    • 1 homme(s)
    • 1 femme(s)
  • Durée approximative : 80 mn
  • Création :
    • Période : 2013
    • Lieu : Sala Beckett (Barcelone)
  • Domaine : protégé

Édition

Cette traduction n'est pas éditée mais vous pouvez la commander à la MAV

Résumé

Ulysse est un ingénieur immigré. Il ne sait s’il doit rester vivre dans la ville occidentale qu’il est en train de bâtir ou reprendre son périple pour retourner chez lui auprès de sa famille. Aux confins de cette cité en perpétuelle mutation, il rencontre une femme dont l’identité s’avère tout aussi changeante. C’est Électre qui revient des funérailles de sa mère. C’est Phèdre qui est tombée amoureuse de lui. C’est Médée qui sort de prison après y avoir passé dix-sept ans pour le meurtre de ses enfants. C’est Antigone, la sœur d’un terroriste traqué par la police.

Dans Cet air infini, Ulysse a perdu son aura épique pour devenir un immigré ordinaire que l’on ne regarde plus, que l’on ne voit plus. Son odyssée est celle de la survie dans un monde devenu invivable, qui se détruit et se reconstruit à notre insu. La femme qu’il rencontre a, quant à elle, fait le choix de s’opposer farouchement à ce monde. Le sabotage passionnel auquel elle s’est livrée la laisse au bord d’un gouffre qui donne à voir toute la misère d’un temps, le nôtre, où règnent l’apathie et la servitude volontaire.

La tragédie devient alors l’étalon permettant de prendre la mesure de ce désastre intérieur dont parle Annie Le Brun, « qui a pour résultat de nous tromper sur ce que nous sommes et plus encore sur ce que nous pourrions être ». 

Cette pièce de Lluïsa Cunillé a remporté le Prix national de littérature dramatique (Espagne) en 2010.

Regard du traducteur

Lire notre entretien avec Laurent Gallardo à propos de Cet air infini et Lluïsa Cunillé.

La pièce nous invite à changer le regard que nous portons sur l’invivable vie de celles et ceux que notre jugement condamne à la marge sociale. Que se passe-t-il si, au lieu de considérer avec indifférence et lassitude les hommes et les femmes qui tentent de traverser la Méditerranée, nous les regardions à l’aune des mythes fondateurs de notre culture occidentale ? La figure d’Ulysse devient alors une clé de lecture pour mettre en lumière la singularité de ces destins héroïques.

Qu’en est-il de Médée après qu’elle a tué ses enfants pour broyer le cœur de Jason ? Dans quelle mesure la tragédie grecque nous permet-elle d’échapper à la tyrannie du jugement ? Dans le poème qu’il place en exergue de son récit autobiographique sur Auschwitz, Primo Levi nous interpelle par ses mots : « Considérez si c’est un homme / Que celui qui peine dans la boue / […] Considérez si c’est une femme / Que celle qui a perdu […]/ jusqu’à à la force de se souvenir ».

En ayant recours au mythe et à la tragédie, Lluïsa Cunillé nous invite à un questionnement semblable. S’il est une odyssée dans cette pièce, c’est bien celle du spectateur en quête d’un regard qui, libéré du jugement, considère l’égalité de toutes et de tous comme un impératif essentiellement humain.