Une heureuse occasion

de Aphra Behn

Traduit de l'anglais par Bernard Dhuicq

Avec le soutien de la MAV

Écriture

  • Pays d'origine : U.K.
  • Titre original : The lucky chance
  • Date de traduction : 1993

La pièce

  • Genre : comédie de moeurs
  • Nombre d'actes et de scènes : 5 actes, 19 scènes
  • Décors : les scènes se déroulent dans une rue, une demeure bourgeoise, un logis sordide, une chambre à coucher, une buanderie, une chambre haute, un hall d'entrée, un jardin, un petit salon...
  • Nombre de personnages :
    • 10 au total
  • Création :
    • Période : en 1686, puis rejouée en juillet 1984
    • Lieu : Royal Court Theatre - Londres
  • Domaine : public

Édition

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Résumé

Bellamour s'est réfugié à Bruxelles après un duel où il a tué son adversaire. Il revient à Londres où il a laissé sa fiancée, Laetitia. Celle-ci le croyant mort accepte d'épouser un riche échevin de la Cité, sir Faiblard. Ce vieillard, tout comme son ami, sir Prudent, seront les têtes de turc des jeunes libertins et roués que sont Bellamour et son ami, Bontemps : les jeunes amants n'auront de cesse de faire cocus les deux échevins. Quiproquos, duperies se succèdent; diables et fantômes font partie de l'intrigue. Les vieillards finissent par comprendre que leurs femmes sont plus heureuses avec leurs jeunes et vigoureux amants... Intrigues doubles, voir triples : les mariages forcés se défont, les mariages conclus également, dans cette comédie libertine...

Regard du traducteur

Jouée en 1686, The Lucky Chance est la 15e pièce d'Aphra Behn. Après avoir produit des pièces inspirées par les romans précieux, elle trouva sa voie en se tournant vers ses contemporains dont elle sut tourner en ridicule les travers. L'époque se reflète bien s?r dans le théâtre d'Aphra Behn, tout comme le contexte français se lit dans les textes de Molière. Contemporaine de Wycherley et d'Etheredge, Aphra Behn emprunte la verdeur du premier dans les rôles masculins et la retenue du second pour faire parler les femmes.

Pièce dont l'action est toujours relancée par de nombreuses entrées et sorties, Une heureuse occasion demeure ì moderne î en dépit de son contexte historique marqué : les échevins, sir Prudent et sir Faiblard, vieux barbons, sont d'anciens partisans de Cromwell, des ì Têtes rondes î ; ils représentent la classe des marchands qui allaient précipiter la chute des Stuart et asseoir définitivement la monarchie constitutionnelle. Les jeunes amants, Bellamour et Bontemps sont les homologues des libertins d'alors, Rochester, Sedley et autres ì roués î ; ils sont dans la tradition des ì Cavaliers î, défenseurs de Charles Ier. Les personnages secondaires masculins, Jobard, Le Bruyant, sont des petits-maîtres, des ì précieux ridicules î. Les femmes ont ì le beau rôle î ; elles portent de véritables noms : Laetitia, Julia, Diana ; elles n'ont pas de façade mais sont elles-mêmes, expriment tous leurs désirs et aspirent à des amours fondées sur la constance. Clins d'oeil aux spectateurs avec allusions à Shakespeare ou références à celui-ci font partie de la riche intertextualité d'Une heureuse occasion : on y entend en particulier l'écho des joutes oratoires des amants de Beaucoup de bruit pour rien, pour ne citer que cette comédie. Vie, plaisir, mouvement, sensualité, esprit sont les qualités de cette pièce.

En conclusion, il faut souligner le message ì féministe î, avant la lettre, de la pièce : Aphra Behn condamne les mariages forcés, celui de Jobard et de Diana, les mariages 'disproportionnés', celui de sir Prudent Coffre-plein et de Julia, celui de sir Faiblard Voudrait-tant et de Laetitia. Ces trois femmes revendiquent toutes le droit de vivre pleinement, librement mais sans pour autant se servir du double code qui permet aux hommes de tromper leur partenaire tout en lui imposant la fidélité. Julia est la femme m?re qui devient l'enjeu d'une partie de dés inf‚mante et pour son mari et pour son amant. Celui-ci se fait passer dans le lit conjugal pour son mari avec l'accord de ce dernier. Parfois dans un univers manichéiste, les hommes, l'homme en général, sont décrits comme des créatures faibles et perverses qui de chasseurs deviennent chassés et font même parfois l'objet de la pitié féminine. Faut-il rappeler que les féministes américaines avaient donné comme titre à leur magazine littéraire le prénom de cette femme hors du commun, Aphra ?