Les risques du métier

de Rosalyn Drexler

Traduit de l'anglais par Jean-Pierre Richard

Avec le soutien de la MAV

Écriture

  • Pays d'origine : U.S.A.
  • Titre original : Occupational hazard
  • Date d'écriture : 1991
  • Date de traduction : 1994

La pièce

  • Genre : Drame poétique (inspiré d'une nouvelle de Kafka :
  • Nombre d'actes et de scènes : 1er acte : 6 scènes ; 2ème (et dernier )acte : 3 scènes.
  • Décors : Le bureau d'une Caisse d'assurances. Ecran et rétroprojecteur.
    Un cirque avec cage à roulettes et petit orchestre de cirque, animaux artificiels.
  • Nombre de personnages : 18 (minimum 8), La plupart des rôles en doublé ou plus dont 14 (minimum : 5) homme(s) et 4 (minimum 3) femme(s)
  • Domaine : protégé : Agent Mr. Francis Del Duca - Fifi Oscard Agency - New-York

Édition

Cette traduction n'est pas éditée mais vous pouvez la commander à la MAV

Résumé

Au centre de l'Europe, à l'aube du XXème siècle, un cirque exhibe en cage "un artiste de la faim", prié de je?ner environ 30 jours, mais pas plus, car, au-delà, l'intérêt du public s'émousse. Or l'artiste, lui, est poussé, à son corps défendant, à je?ner jusqu'à la mort, faute de trouver en ce monde la nourriture à sa convenance. Même le bel amour réciproque qui l'unit à Emma (rencontrée à l'époque où il travaillait dans les assurances contre les Accidents du Travail) ne peut le sauver de cette fin à laquelle il aspire, faute de mieux. Transféré dans un cirque dirigé par un Allemand anti-sémite pour qui "tout cirque a besoin de son Juif", l'artiste, juif lui-même, finit par se laisser mourir de faim, dans l'indifférence générale.

Regard du traducteur

Cet artiste de la faim/fin est une figure dramatique inoubliable. Présent sur scène d'un bout à l'autre de la pièce, qu'il parle ou non, la seule présence de ce squelette vivant presque toujours en cage, creuse l'espace dramatique jusqu'au vertige, jusqu'à la vérité pure. Sur ce fond d'absolu, tout propos dans la bouche des autres personnages prend un relief saisissant. Tantôt le monde "normal" se trouve instantanément frappé d'absurdité. Tantôt ressort l'effroyable cruauté des "honnêtes gens" : chez le public, le voyeurisme ; chez les directeurs de cirque, l'inconscience du "bon sens" ou le cynisme du lucre. Or nous, spectateurs, regardons aussi l'artiste dans sa cage... Rien - pas même l'amour d'une jeune et jolie femme (Emma) - ne peut sauver l'artiste de cette faim d'absolu qui le dévore. (La pièce ne postule pas non plus de transcendance). Gr‚ce au personnage attachant d'Emma, la lucidité désespérée (soulignée par les jeux de lumières et d'ombres) de cette pièce courte et forte sur un artiste de la faim s'accompagne d'une poésie, d'une tendresse parfaitement humaine - et donc parfaitement impuissante. La présence d'une femme entre le je?neur et le reste de la société, entre l'absolu et le quotidien, atténue la radicalité du cheminement vers la mort. Au propos métaphysique, teinté de poésie, l'auteur ajoute discrètement une dimension historique : "chaque cirque a besoin de son Juif"... Ainsi convergent sur l'artiste de la faim trois axes fondamentaux de la pièce : la situation du juif, celle de l'artiste et la condition de l'homme. Dans l'atmosphère festive du cirque, avec des personnages (artistes ou spectateurs) hauts en couleur, qui nous font rire et sourire, se déroule le pire qui se puisse imaginer. Une réussite exceptionnelle. Quelle force a le théâtre !