Les Racines coupées

de Jeronimo Lopez Mozo

Traduit de l'espagnol par Christine Gagnieux et David Ferré

Avec le soutien de la MAV

Écriture

  • Pays d'origine : Espagne
  • Titre original : Las raices cortadas
  • Date d'écriture : 2003
  • Date de traduction : 2004

La pièce

  • Genre : dramatique
  • Nombre d'actes et de scènes : 5 tableaux
  • Décors : 4 : école / bureaux / salon / chambre d’hôpital
  • Nombre de personnages : dont homme(s) et femme(s)
  • Durée approximative : 2h
  • Création :
    • Période : 20 mai 2005
    • Lieu : Centro Koldo Mitxelena, San Sebastian.
  • Domaine : compagnie Bululu a les droits en Espagne

Édition

Résumé

Histoire de deux femmes parlementaires espagnoles (Victoria Kent et Clara Campoamor), le texte est structuré par cinq rencontres apocryphes, par le jeu de la mémoire de l’une d’elles, Victoria, à travers la vie politique de l’Espagne du XX°. Il revisite la guerre civile à travers le rapport entre monarchie, dictature, démocratie, en posant le problème de l’individu au sein du macrocosme politique. Le changement de temporalité permet de créer une spirale du dialogue au monologue, où la parole trouble la fiabilité du référent, créant ainsi plusieurs espaces de fiction. Néanmoins les dialogues demeurent profondément humains. La langue fictive de l’Histoire à travers la vie politique et intime de ces deux femmes, alors en pleine fleur de l’âge, est incarnée par plusieurs figures qui oscillent entre le sentiment de l’échec, de l’amputation et de la frustration. L’auteur utilise la mise en abîme jusqu’à l’inversion du théâtre, grâce au dédoublement que permet l’intervention de marionnettes directement manipulées par les deux personnages.

Regard du traducteur

On retrouve les grandes caractéristiques du Baroque actualisées à travers l’histoire contemporaine espagnole. Quel domaine possible pour l’application démocratique et le fondement du droit constitutionnel et civil ? C’est le problème du libre arbitre et de la décision qui s’impose au souvenir de ces deux femmes à travers toute leur vie. Les personnages évoluent dans un clair-obscur jusqu’à déboucher sur une vaste plaine, plus limpide ; l’individu et son destin sont déplacés au sein du cosmos en réévaluant l’action humaine comme la seule déterminante de l’histoire, mais dont la finalité restera à jamais inconnue de ses constructeurs (avec la très efficace métaphore des cathédrales gothiques). Deux actions avancent parallèlement, passé et présent, et parfois, s’entremêlent. Le texte enferme le sentiment de la vie, du temps qui passe et de la vanité humaine, et aussi de la manipulation (qui manipule quoi, qui ?). La liberté ne serait pas un état de fait mais une expérience. La mémoire agit comme un référent instable de la réalité (illusoire ou pas) et dans la même trame de vie, le rêve et la réalité se côtoient. Une écriture plastique où la réalité ne serait autre chose que des images… L’axe dominant, la mémoire de Victoria Kent, se trouve en dehors de l’espace central et s’enfuit constamment. On est pris dans la mouvance du désir de capter le monde à travers un paysage artistique qui attire tout vers lui, à savoir le contexte historique et politique de l’Espagne et de sa II° république. Une écriture très incarnée, du soliloque au dialogue, permet de jouer sur des mises en abîme en alimentant l’altérité à travers les reflets des personnages, qui apparaissent alors comme différentes figures, presque sous forme d’homonymes, interrogeant le problème de l’identité. Ainsi, à travers le contexte politique de l’Espagne au XX siècle, la situation des personnages acquiert un sens autonome pour évoquer la figure universelle de l’être humain. Les événements ont une fonction dramatique mais opèrent aussi à un niveau symbolique. Nous trouvons une constante philosophique : celle de la culpabilité, ou de la responsabilité, et ses implications sociales et politiques, ainsi que l’importance de l’acte de liberté comme un acte de résistance. Ou l’inverse. On ne peut plus actuel… David Ferré / 2004