Écriture

  • Pays d'origine : Cuba
  • Titre original : La Bahía
  • Date d'écriture : 2018
  • Date de traduction : 2021

La pièce

  • Genre : friction documentaire
  • Nombre d'actes et de scènes : 9 parties
  • Décors : non précisé
  • Nombre de personnages :
    • 1 au total
    • 1 femme(s)
    • Des voix plus que des personnages. Une au moins, féminine, et fragmentée, qui s’appelle Yunet. Et d’autres, qui parlent de Yunet.
  • Création :
    • Période : 25 septembre 2018
    • Lieu : Fondation Ludwig (La Havane)
  • Domaine : protégé

Édition

Cette traduction n'est pas éditée mais vous pouvez la commander à la MAV

Résumé

La Baie est une pièce qui fait figure d’ovni dans le panorama théâtral cubain. De quoi s’agit-il ? D’une recherche — une « friction documentaire » pour reprendre les mots de l’autrice — sur la Ciudad Nuclear, la Ville Nucléaire, la ville construite à proximité de la centrale nucléaire installée à Juraguá, dans la baie de Cienfuegos à Cuba : un projet qui est né en 1975, fruit d’une collaboration entre Cuba et l’URSS.

La Baie se décline sur différents supports :

- un livre, qui inclut des notes de travail, des notes prises sur un iPhone, des SMS, des coupures de journaux, les notes de bas de page d’un recueil de poèmes inédit : autant de traces d’une recherche préalable, d’une pièce en train de se construire, comme un journal de bord, comme des rushes dont le montage n’est jamais définitif,

- un film, écrit par Alessandra Santiesteban et réalisé par Ricardo Sarmiento,  

- un recueil de poèmes inédit, intitulé Elle préfère les lundis, signé Yunet, « l’autre » de l’autrice,

- une performance.

Soit quatre versions d’une même histoire, trois documents et plusieurs interventions « vivantes » qui conforment le tableau d’une désillusion, la chute d’une utopie, exprimée dans la forme même que prend le projet, son incomplétude : les quatre supports se répondent les uns aux autres et sont chacun par essence inachevés, en manque d’un tout. C’est un work in progress qui s’exhibe, une histoire qui ne peut s’écrire à une seule voix, une théâtralité à construire.

Regard du traducteur

La Baie bouleverse les repères de ce qui fonde un texte de théâtre. Se jouant des frontières génériques, ce « projet » est conçu comme un spectacle vivant en construction.

Qui peut donc le rendre vivant ? Celle qui l’a imaginé, certes. D’elle, il est sans cesse question dans le texte. Et pourtant, s’agit-il d’un texte écrit pour son autrice, qui ne peut être joué que par elle ?

Si la question semble légitime, la réponse se trouve ailleurs : dans une écriture qui annonce d’emblée que l’auteur est une fiction : « L’héroïne se prénomme Yunet ou prétend être Yunet. Elle est née à Baïkonour, au Pôle Nord ou à Simbirsk, mais elle préfère dire Holguín, le 10 juin à 18 heures. »

La Baie se (dé)construit comme un jeu de piste. C’est l’histoire de Yunet (ou Alessandra Santiesteban ?). C’est l’histoire de Cuba. C’est le récit d’une crise. C’est l’expression du vertige avant la chute.

Vertige : tel est le mot qui définit à mon avis l’écriture d’Alessandra Santiesteban. Toujours au bord. Au bord du réel. Au bord de la fiction. Au bord du familier. Au bord du poétique. Au bord du théâtre.

C’est une écriture qui, dans sa forme, explore les façons de dire le vertige.

Et c’est une autre façon de raconter Cuba, loin des clichés ou des repères attendus.