Pinkson

de Caren Jeß

Traduit de l'allemand par Pauline Fois

Avec le soutien de la MAV

Écriture

  • Pays d'origine : Allemagne
  • Titre original : Bookpink
  • Date d'écriture : 2016
  • Date de traduction : 2022

La pièce

  • Genre : comédie grinçante
  • Nombre d'actes et de scènes : 7
  • Décors : non précisé
  • Nombre de personnages :
    • 36 au total
    • Animaux ou végétaux. Pour la distribution, il est souhaitable que les comédien·ne·s endossent plusieurs rôles.
  • Création :
    • Période : 2019
    • Lieu : Schauspielhaus Graz
  • Domaine : protégé

Édition

Résumé

Pinkson compte sept dramuscules et 36 personnages dont la moitié sont de drôles d’oiseaux présentant toutes les caractéristiques de l’humain. Les scènes, que l’on peut lire et mettre en scène isolément, sont cruelles et hilarantes, jouent sur tous les registres et tous les mots. Il est question d’égalité, de métamorphoses, de religion et d’ésotérisme, d’une relation mère-fils compliquée, de genre. Le tout compose un ensemble baroque, entre théâtre narratif, « Welttheater » et allégorie.

Sale Paon, dont la mère choisit délibérément de pondre l'œuf dans un bois sombre en espérant qu’il meurt à la naissance, se trouve sacrément désavantagé par rapport au Moineau avec sa bonne éducation et son plumage parfait. Un paon qui ne peut pas faire la roue a-t-il une place dans notre société ? Le petit Corbeau de FLAMINGO’s dance ! n’est pas mieux loti avec sa mère alcoolique qui rentre systématiquement en hurlant, sans même savoir ce qui se passe. Veroniko (La mésange des marais) a, quant à elle, cessé de se raser les jambes, provoquant l’indignation dans la communauté mésanges. Sans oublier Dinde, dont le discours teinté d’ésotérisme et défiant toute logique scientifique fait particulièrement écho à l’actualité de la crise sanitaire. Un mystère opaque entoure Busard et le Cocon de la raison (Busard dans le béton de la raison), auprès duquel une foule d’oiseaux se pressent, cherchant des réponses à leurs questions existentielles. Dans Cueille le pinson, une multitude de mauvaises herbes (L.actusa serriola, G.eranium Robertianum, B.ryum argentum, T.rifolium repens) poussent entre les dalles de l’Allée Pavée et se révoltent de leur condition. Enfin, Blanche Colombe ne comprend pas très bien ce qu’elle fait dans ce camping, elle qui rêve de baroque.

Regard du traducteur

Au fil des scènes, l’intérêt de l’autrice pour les questions qui animent nos sociétés se précise. Des thématiques aussi diverses que l’identité de genre, l’égalité des chances, la maltraitance infantile ou encore l’isolation sociale et ses conséquences sur le discernement sont abordées. En donnant la parole à des animaux, des plantes, des idées personnifiées et des allégories, l’autrice réussit à installer la distance nécessaire pour aborder ces thématiques sous un jour nouveau, loin des clichés. Et comme Jeß semble faire de la norme et de la banalité ses ennemis dans l’écriture, elle les élimine radicalement par l’humour : l’inventivité lexicale, la recherche sur les sonorités et le jeu avec le registre vulgaire font de Pinkson une pièce résolument drôle. Des noms (Sale Paon) aux indications temporelles (« 4-5 cigarettes », « trois soirées » ou encore « sans importance ») en passant par les lieux (« Avril »), chaque détail est travaillé pour un rendu inventif et original. Et si la forme s’apparente à celle de la fable, brève et invitant à la réflexion, Pinkson refuse toute morale, laissant la place à des chutes amères comme dans FLAMINGOS d a n c e ! où la mère de Corbeau découvre son fils pris au piège de la boîte à musique, voire absurdes, comme à la fin de Busard : « Busard pond un œuf. »

La souplesse de cette forme baroque – pas d’ordre défini des scènes, comédien·ne·s incarnant plusieurs personnages – ouvre la porte à une multitude de possibilités pour la mise en scène. Pinkson est une pièce à la fois intelligente et divertissante qui invite à un spectacle haut en couleurs et en émotions.