Je t'embrasse la gueule

de Yorgos Dialegmenos

Traduit du grec moderne par Constantin Bobas et Sophie Giré

Avec le soutien de la MAV

Écriture

  • Pays d'origine : Grèce
  • Date de traduction : 2003

La pièce

  • Nombre d'actes et de scènes : Deux parties (la deuxième partie en deux tableaux)
  • Nombre de personnages :
    • 8 au total
    • 4 homme(s)
    • 4 femme(s)
  • Création :
    • Période : 1987 et 1997
    • Lieu : Athènes
  • Domaine : Pour le texte original, l'auteur - pour la traduction française l'Atelier Européen de la Traduction - Scène Nationale d'Orléans

Édition

Cette traduction n'est pas éditée mais vous pouvez la commander à la MAV

Résumé

La pièce évolue dans une atmosphère onirique, comme l'indique son auteur. Un couple de chiffonniers, Mitsos, 75 ans et Glyca, 74 ans, les deux personnages principaux, vivent en ramassant des cartons et en squattant différentes maisons inoccupées. L'œuvre s'ouvre sur la tentative d'assassinat d'une femme, une prostituée, par le fils de Mitsos, Argyris, acte qui se reproduira à un autre moment de la pièce. Le couple vit dans une maison classée monument historique, aux fenêtres condamnées. Mitsos a passé sa vie dans les poubelles, c'est là qu'il a connu Glyca. Argyris, qui viendra leur rendre visite, exige d'apprendre qui était sa mère et qui avait décidé de l'abandonner dans un orphelinat. La conversation dégénère ; Argyris attaque son père pour obtenir une réponse. Mitsos, sous la pression, lui avoue que sa mère étant enceinte est devenue folle et que les médecins l'ont enfermée dans un asile, mais sans qu'il sache où exactement. La pièce se termine sur le siège de la maison par les CRS venus expulser ses deux occupants.

Regard du traducteur

Je t'embrasse la gueule donne le sentiment d'une pièce réaliste qui, dans le meilleur des cas, est minée par un réalisme magique ambiant tout en restant ancrée dans la charpente si tactile de l'expérience quotidienne. Chaque élément constituant se trouve en position de mouvement, souvent contradictoire, qui enlève toute perspective de cohésion superficielle en optant pour l'expression de forces se complétant de point en point. Ainsi, tout événement, toute pensée, toute phrase contient en puissance sa propre décomposition en tant que valeur motrice allant se greffer ailleurs en sortant d'un cadre conventionnel d'articulation. Un matériau flottant qui évolue au travers d'une légèreté significative malgré un thème qui ne s'y prête guère. Et cette texture sous-tend une plasticité importante, qui dans une présentation scénique, pourrait agir à partir d'innombrables points de vue, même si la pièce n'offre pas facilement prise sous ses airs innocents, presque naïfs, d'une grande coloration populaire. L'enjeu est si bien enfoui que nous distinguons à peine un questionnement archétypal qui passe par des personnages à souche unique, un bloc, mais à l'intérieur duquel la stratigraphie est extrêmement complexe.
Il en va ainsi de sa matière langagière, souvent formée de composants qui, dans une expression courante, ne devraient pas se trouver ensemble. D'où une cassure profonde de la parole qui procède à une restructuration permanente de l'énoncé revêtu de sens et de non-sens. L'équilibre est toujours fragile, surtout pour la traduction, appelée à agencer un mouvement entre la raison et la déraison, le visible et l'invisible, le réel et l'irréel, donnant toute son épaisseur à la notion du traduisible et de l'intraduisible.
Les mots, les personnages, la scène sont suspendus dans le vide, ils utilisent les moyens qui sont les leurs pour se b‚tir une position stable. Construire une ligne, des lignes d'expression et d'existence où le plein et le vide se succèdent dans la violence et la tendresse de leurs rapports, par le biais d'une expression ininterrompue où chaque élément se répond simultanément.